Ils sont un jour venus, s’installer dans mon pays.
Je ne l’ai pas choisie, la langue de Molière. C’est elle qui m’a choisie, qui m’a offert un jour, ces airs que je chéris.
Je ne l’ai pas choisie. C’est elle qui m’a saisie. A l’âge de la toupie, j’avais d’abord appris : « Pirouette, Cacahuète » et la « Gentille Alouette ».
Je n’ai pas décidé, que j’allais préférer, à la langue de mon pays – la brune ensorceleuse, la belle des Milles Nuits – la langue de Paris.
Je n’ai pas décidé, que j’allais préférer, la blonde merveilleuse, douce mais ténébreuse, aux sons de ma famille, sublime poésie.
Ils sont un jour venus, s’installer dans mon pays.
Ils sont, je crois, partis. Mais… je sens qu’ils sont ici. Je les entends revenir. Ils sont là ! Ils respirent.
Ils ne partiront pas, ils font partie de moi. Le son de ma propre voix. Et je crains quelquefois, que j’ai perdu la voie quand j’ai trahi ma foi.
Samar Miled
Duke University