Alors que le bus allait arriver au petit village sénégalais où nous allions construire une école, quelques villageois à cheval nous accompagnèrent, début d’une réception pour nous, étudiants américains. Le bus est enfin arrivé, et nous avons eu droit à une célébration avec de la musique, du théâtre, et de la danse pendant que les villageois nous accueillaient dans leur village. Les conditions surprenantes dans lesquelles les Sénégalais vivaient nous ont choqués, mais les villageois ne semblaient pas mécontents. En fait, ils étaient ravis de nous voir.
Il y a trois ans, j’ai eu l’opportunité d’aller au Sénégal avec une petite équipe de mon petit lycée, une école catholique à Reno, Nevada. Quelques amies ont travaillé avec ma prof de français, Madame R, pour établir un club qui s’appelle BuildOn, une organisation nationale qui est spécialisée dans la construction des écoles dans les endroits défavorisés. Malgré le fait que je n’étais pas dans ce club, ma prof m’a néanmoins encouragée à faire partie du voyage au Sénégal. Un voyage si important et si loin, cela me faisait peur, mais j’ai décidé de le faire.
Après que la célébration de bienvenue fut terminée, chacun de nous a rencontré la famille avec laquelle on vivrait pendant la semaine (ou, plus spécifiquement, six jours). Mon “père,” Usman, m’a guidé timidement mais gracieusement chez lui. Sa maison serait ma maison temporaire (j’y habitais avec deux amies aussi). La maison n’était pas une seule structure séparée à l’extérieur. En revanche, elle consistait en quelques structures de parpaings, une latrine, un endroit assez privé pour se laver (la douche était un seau d’eau), un petit corral pour leurs animaux, et un espace commun au centre des structures. Usman, avec ses deux femmes et tous ses enfants, plus quelques enfants du village (la notion d’une famille n’était pas confinée à celle formée de personnes apparentées biologiquement) nous a accueillirent dans leur maison. De plus, pour notre protection pendant la nuit, Usman couchait dehors, sur la terre.
La famille d’Usman est devenue ma propre famille. C’étaient des personnes dans le village qui pouvaient parler français, et, malgré le fait qu’une connexion forte existait les villageois qui ne parlaient pas français, la connaissance du français m’a permis d’avoir une expérience plus profonde et significative. Le français, je le notais, est un moyen de connexion. La langue transcende les différences de race, de culture, de classe, et de nationalité. Pendant cette semaine, dans un pays étrange, j’ai eu l’opportunité de tester le pouvoir de la langue, et j’étais heureuse d’avoir décidé d’étudier le français quand j’ai commencé mes études dans un petit lycée à Reno.
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La décision d’étudier le français n’était pas sérieuse. Je me suis demandée quel prof je préférerais, et s’il serait facile de réussir. J’ai choisi le français parce que la culture française m’intéressait plus que celle de l’Espagne. Dans mon adolescence, j’avais eu beaucoup de chance d’avoir l’occasion de voyager et de rencontrer des cultures diverses, dont la culture française. La sophistication, la nourriture, l’art, le cinéma, l’architecture, et la beauté de la France, tous ont piqué ma curiosité, mais la passion que je possède aujourd’hui pour ces choses françaises me manquait à ce moment-là.
Néanmoins, avec chaque cours de français, je suis tombée de plus en plus amoureuse de la France et sa langue, si belle, si fluide. Madame R, une prof magnifique qui a partagé avec nous sa propre passion, et qui a cultivé une sorte de famille dans sa classe, nous a montré la joie d’apprendre une langue, surtout une langue comme le français. Alors que le cours devenait plus difficile, la classe s’est réduite, petit à petit, jusqu’à six personnes qui sont restées, dans le cours du français “AP” pendant la dernière année du lycée. Notre petite famille est devenue plus intime, et pendant que nous apprenions les règles grammaticales, et pendant que nous discutions les actualités en français, nous avons partagé ensemble nos joies et nos luttes, nos réussites et nos échecs. La classe de français, pour moi, était plus qu’un cours de langue—elle était vraiment un refuge où je me sentais sûre, contente, en paix.
Le français m’a rendue heureuse, mais je n’aurai jamais imaginé prévu toutes les opportunités que cette langue me donnerait. Pendant ma dernière année de lycée, mon père et moi, nous sommes alles à Paris ensemble. Je pouvais comprendre les avertissements, les noms des rues, les menus…Je pouvais parler avec les parisiens ou participer à une discussion philosophique avec notre conducteur de taxi. Tout d’un coup, le monde s’est ouvert, révélant une confiance en moi dont je n’avais pas conscience. Quand je parle français, je suis libre; je suis plus ouverte et plus attentive. Cette langue me transporte et me donne une nouvelle façon de penser. C’est comme si je devenais non pas une nouvelle personne mais une nouvelle version de moi-même.
Le français me libère, mais plus profondément, il me permet de former des relations avec les autres; il est un moyen de connexion et de communication. Je pense souvent à mes amis sénégalais. Pendant cette semaine d’été, dans un pays si chaud mais si plaisant, j’ai compris la vraie puissance de la langue et comment elle est une clé pour une vie plus riche et épanouissante. Pour moi, la connaissance du français est le cadeau ultime, et j’aurai toujours envie de continuer d’approfondir cette connaissance, continuant de cultiver de nouvelles connexions, enrichissant ma vie comme résultat
Matigan King
New York University